Steve Zakuani, l’horloge dorée s’est arrêtée

Il aura été un des plus grands espoirs de la République Démocratique du Congo. A 26 ans et 6 années chez les professionnels, Steve Zakuani a raccroché les crampons dans un tableau qui l’a emmené des rues arides de Kinshasa à Providence Park, l’écrin des Portland Timbers en Major League Soccer. Récit d’une carrière où les blessures ne l’ont pas vraiment épargné.

Sa carrière a connu un clap de fin le 29 octobre dernier sur son site internet. L’ancien international Congolais a annoncé la fin de carrière. Ses raisons sont principalement dues aux maux de son corps, une décision difficile à prendre pour l’intéressé : « Je ne voulais pas arrêter, mais après avoir étudié toutes les options, mon cœur m’a contraint à dire stop. Même si la décision est douloureuse, je sais qu’elle est bonne ».

Il est vrai que depuis trois ans, Zakuani a subi sept interventions chirurgicales (dont une pour une fracture du tibia en 2011), passant la plupart de son temps à l’infirmerie et en salle de rééducation. Une période trouble où le mental est mis à rude épreuve comme il l’a expliqué : « Être sur le carreau plutôt que sur le terrain a été la chose la plus compliquer à faire face. J’ai creusé au plus profond de moi mentalement ».
Si bien que son honnêteté a pris les devants sur l’envie de jouer au football. Ne voulant pas compromettre sa santé sur le long terme, l’ex-joueur désormais des Portland Timbers n’apparaîtra plus sur les feuilles de matches. Un combat a pris fin, mais Steve Zakuani laissera derrière lui une carrière de footballeur qu’il a embrassée pendant plusieurs années de sa vie : « Je repense au chemin parcouru et ce sentiment de fierté qui m’accompagne restera gravé. J’ai voulu faire ce métier, en jouant devant des milliers de personnes, en marquant des buts et entendre mon nom clamé par les supporters, tout cela a été réalisé ».

Né à Kinshasa et originaire du quartier de Gombe, une commune au nord de la capitale Congolaise qui abrite les principaux organes importants du pays comme le Palais de la Nation, fief de la Présidence de la République et de nombreux ministères, Steve Zakuani n’y passera qu’une partie de sa vie.

Alors qu’il n’a que 4 ans, son père, pour des raisons politiques et professionnelles (ayant trouvé un poste de traducteur) doit quitter l’Afrique pour l’Europe et Londres, emmenant l’ensemble de sa famille. Dans les quartiers difficiles du nord de la cité anglophone, le jeune Steve apprend les rudiments du football, s’exerçant inlassablement chaque jour. Proche de White Art Lane, l’antre de Tottenham, il rêve de devenir footballeur. Son potentiel grandissant, des clubs de la capitale viennent alors s’informer. On note un intérêt de West Ham, des Queens Park Rangers où il effectuera un essai non concluant. Finalement, c’est Arsenal qui enrôle le natif de Kinshasa en 1997. Pendant 6 ans, il évoluera sous les couleurs des Gunners. Néanmoins, un manque d’intérêt sur son travail scolaire et son arrogance ont raison du parcours de Steve Zakuani à Arsenal en 2002.

Dès lors, l’enfant prodige passe de l’autre côté de la barrière : « beaucoup de personnes avec qui j’ai grandi ont commencé à aller en prison, à se droguer et je ne travaillais pas à l’université » déclarait-il dans une interview en 2011. Gravement blessé suite à un accident de scooter qu’un ami avait préalablement volé, il est contraint  de ne plus jouer durant plus d’un an et demi. Moins passionné par le jeu, un de ses maîtres de conférence Paul Goodison et l’évangéliste Myles Munroe (connu pour avoir écrit plus 60 ouvrages) le remettent sur le bon chemin et le motivent à réaliser son souhait. Désormais très croyant, il multiplie les essais et tente de rejoindre QPR, Wigan, Bilbao, l’AZ Alkmaar et Valladolid en vain.

Finalement, à l’âge de 19 ans, il s’envole pour les Etats-Unis et l’université d’Akron dans l’Ohio.

En 2008, son équipe universitaire est finaliste du trophée Hermann. Quant à lui, il marque plus d’une vingtaine de buts et délivre 7 passes décisives. En parallèle, il évolue avec Cleveland, participant à seulement 11 rencontres mais démontrant son talent précoce avec 9 pions inscrits et 4 passes décisives. Des débuts remarqués qui vont lui permettre d’être sélectionné comme le choix numéro 1 des Seattle Sounders lors de la MLS SuperDraft grâce au programme génération Adidas. Auparavant, il avait refusé de nombreuses offres pour signer en faveur de la Major League Soccer via le contrat d’Adidas lui garantissant de finir ses études. Finaliste au titre de recrue de l’année 2009, il dévoile sa classe à la franchise entière et réalise une très bonne première saison à Seattle, ponctuée par la victoire des Sounders à l’US Open Cup.

Il explose véritablement l’année suivante, récoltant ainsi les louanges de son entraîneur et de ses partenaires. Marquant également le but le plus rapide de l’histoire du club contre Colombus Crew. Ses statistiques impressionnent. Le board souhaite alors voir certains joueurs de l’effectif s’entraîner sur le sol européen, Steve Zakuani sera de ceux-là et rejoindra Everton durant plusieurs entraînements.

D’autre part, il fonde en 2010 l’organisation « Kingdom Hope » ayant pour but d’ouvrir une Academy afin d’apprendre le football à des adolescents en difficulté dans la région de Seattle.

Le 22 avril 2011, sa carrière connaît son premier véritable traumatisme. Il se fracture le tibia suite à un tacle de Brian Mullen, face aux Rapids du Colorado. Opéré le jour même, il ne rejouera en MLS que 15 mois plus tard. Les blessures s’accumulent, notamment une hernie discale et deux opérations effectuées à l’aine. De plus en plus rare sur les terrains, son contrat prend fin à Seattle et le 12 décembre 2013 il rejoint les Timbers de Portland. Malgré dix-neuf rencontres disputées, l’envie n’y est plus et la santé prend le pas sur le sportif. Des douleurs à outrance, « mon corps qui pleurait quand je marchais dans l’escalier ou quand je faisais mes lacets » comme il disait sur le message posté sur son site.

Le combat entamé il y a trois ans a été perdu. Ainsi, il a voulu remercier les deux clubs qui l’ont accueilli, le personnel médical et les fans sur les réseaux sociaux : « Je tiens à remercier particulièrement les supporters de Seattle au cours des cinq années où m’avez toujours soutenu. Après mon opération du tibia, les messages de soutiens se sont accrus et m’ont donné la force de continuer, de me battre pour revenir ».

En Janvier, la pré-saison reprendra et Steve Zakuani ne se présentera pas au camp d’entraînement. Au bout du chemin qu’il a mené, le temps s’est arrêté un 29 octobre et l’horloge dorée à vue ses rêves définitivement se refermer.